Certaines n’avaient jamais vu la mer de Julie Otsuka, mise en scène de Richard Brunel

 

Certaines n’avaient jamais vu la mer de Julie Otsuka, mise en scène de Richard Brunel

(C) Jean-Louis Fernandez

(C) Jean-Louis Fernandez

«Sur le bateau, nous étions presque toutes vierges. Nous avions de longs cheveux noirs, de larges pieds plats et nous n’étions pas très grandes. Certaines d’entre nous n’avaient mangé toute leur vie durant que du gruau de riz et leurs jambes étaient arquées, certaines n’avaient que quatorze ans et c’étaient encore des petites filles. D’autres venaient de la ville et portaient d’élégants vêtements, mais la plupart d’entre nous venaient de la campagne, et nous portions pour le voyage le même vieux kimono que nous avions toujours porté-hérité de nos sœurs, passé, rapiécé, et bien des fois reteint. »

Ainsi débute le roman de Julie Otsuka qui évoque le terrible sort de ces japonaises de la première moitié du XX ème siècle. En débarquant à San Francisco, elles pensaient avoir une vie meilleure mais elles ont très vite déchanté. D’autant que la deuxième guerre mondiale mettait en cruelle opposition les deux pays.
Richard Brunel, directeur de la Comédie de Valence,  a adapté ce roman, dans une mise en scène cinématographique. Il nous plonge dans cette réalité méconnue pendant deux  heures… avec quelques longueurs. Illustrée par des tableaux très visuels et des projections vidéo, les  témoignages se succèdent, repris par les comédiennes…
Nous comprenons vite que le sort de ces jeunes immigrés japonaises pleines d’illusion va leur être défavorable dès les années vingt. D’autant qu’en 1941, l’aviation japonaise va bombarder Pearl Harbor. Cette bascule de l’histoire sera un des prétextes à l’expulsion de toutes ces américano-japonaises…

Les comédiennes sont justes et crédibles et Richard Brunel a su rendre efficace ce théâtre-récit, grâce à une scénographie mouvante faite de praticables et châssis mobiles, encadrée par les vieilles pierres du Cloître des Carmes. Natalie Dessay, en bourgeoise américaine chrétienne prise de remords devant cette situation, clôt cette parenthèse de l’histoire peu glorieuse des Etats-Unis.

Un beau travail qui fait renaître la mémoire de ces femmes à qui le metteur en scène rend ainsi un bel hommage.

Jean Couturier.

Cloître des Carmes, Place des Carmes, Avignon, jusqu’au 24 juillet à 22 heures.      

 


Too much Time/Women in Prison d’après Jane Evelyn Atwood, adaptation et mise en scène de Fatima Soualhia Manet

 

 Too much Time/Women in Prison d’après les photos et le texte de Jane Evelyn Atwood, adaptation et mise en scène de Fatima Soualhia Manet

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©Jane Evelyn Atwood

Dans la pénombre du plateau vide, devant un grand écran où seront projetées les clichés de Jane Evelyn Atwood, six comédiennes (dont le metteuse en scène) donneront voix, une heure durant, à des femmes que la photographe a rencontrées derrière les barreaux de 1989 à 1998. Une immersion dont elle n’est pas sortie indemne :  «Il m’a fallu beaucoup de temps “pour sortir de prison“ dit-elle dans un extrait filmé, au début du spectacle. Quand ce reportage a été achevé et publié,  j’avais les cheveux gris et tout le monde utilisait un téléphone portable .» 

Après une plongée dans l’univers des prostituées rue des Lombards à Paris il y a une trentaine d’années, la photographe américaine «fascinée par les mondes clos» et la vie des exclus, se rend dans une quarantaine de prisons en Europe comme aux Etats-Unis. Elle réussit à pénétrer dans les pires établissements, jusque dans les quartiers des condamnées à mort et en est revenue avec des images saisissantes et des témoignages des prisonnières et de leurs gardiens. Dans Trop de peine/Femmes en prison, avec cent-cinquante clichés en noir et blanc, elle montre le quotidien de ces femmes privées de liberté…

Pour Fatima Soualhia Manet, il ne s’agissait pas de reproduire le livre mais de mettre en perspective les paroles croisées des détenues, de l’administration pénitentiaire et de la photographe. Et d’ouvrir ainsi l’espace de la prison, en apportant au public leurs points de vue. Les comédiennes se déploient ensemble, avant de faire entendre chacune:  Gwen, Linda, Brenda, Lynn, Karen… Comment en sont-elles arrivées là, et comment survivent-elles à la culpabilité d’avoir tué leur enfant ou leur conjoint… Comment aussi sont-elles considérées et traitées, et avec quelle différence par rapport aux hommes… Leurs confidences donnent à réfléchir, autant que nous choquent les propos cyniques d’un préposé au couloir de la mort, ou les statistiques sur les délits  féminins, portées par le seul homme de la distribution…

Plus parlantes que tout témoignage, les photos, à la fois réalistes et poétiques, apportent une clarté bienvenue à la noirceur de ces vies recluses. Le jeu des actrices, d’une grande sobriété, évite le pathos, et le spectacle nous interpelle sur des questions souvent passées sous silence. Nous découvrons aussi la beauté des images de cette grande artiste, installée en France depuis 1971, solidaire des grandes causes, et qui, par la suite, avec Les Sentinelles de l’ombre (2004) dénonça les ravages des mines anti-personnelles, après quatre ans d’enquête au Cambodge, Mozambique, Angola, Kosovo et Afghanistan. «Avec des photos provocantes, accompagnées de témoignages de prisonnières, écrit la militante américaine Angela Davis, Jane Evelyn Atwood présente un portrait complexe des conditions où vivent les femmes derrière les barreaux, »

En attendant leur ouverture dans quelques semaines, Les Plateaux sauvages, établissement culturel de Ville de Paris,  jouent hors leurs murs. Ce théâtre-documentaire fait bouger notre regard sur ces femmes en (trop) longues peines. Il faudrait que la justice prenne en considération les souffrances qui ont provoqué leur passage à l’acte. En France, on a fait quelque chose en ce sens, quand  Jacqueline Sauvage, condamnée à dix ans de réclusion pour le meurtre de son mari, a été graciée en 2016.

Mireille Davidovici

Le spectacle a été joué au Cent-Quatre, Paris XIXème du 27 au 29 mars.
La Loge, 77 rue de Charonne, Paris XIème du 17 au  20 avril.
Les Plateaux sauvages, 5 rue des Plâtrières Paris XX ème. T. : 01 40 31 26 35.

Trop de Peines, femmes en prison  a été publié chez Albin Michel  (2000).

Inégalités entre les femmes et les hommes dans les arts et la culture : petit tour d’horizon

egalite-femmes2Inégalités entre les femmes et les hommes dans les arts et la culture : petit tour d’horizon… 

 Rapport du Haut Conseil à l’égalité entre les hommes et les femmes

A la veille du 8 mars, journée consacrée aux luttes pour le droit des femmes, le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes a publié un rapport: Inégalités entre les femmes et les hommes dans les arts et la culture, acte II : après dix ans de constats, le temps de l’action. Statistiques et conclusions restent accablantes et ce, malgré la prise de conscience induite par les rapports de Reine Prat, en 2006 et 2009: «Majoritaires sur les bancs des écoles d’art puis mises aux bans des institutions, les femmes subissent encore pleinement le mythe de la toute-puissance du «génie créateur masculin. (…) Aujourd’hui plus nombreuses  que les étudiants, puis progressivement, à l’image d’un processus d’évaporation, elles deviennent moins actives, moins payées, moins aidées, moins programmées, moins récompensées, et enfin, moins en situation de responsabilités que leurs homologues masculins. Elles représentent aujourd’hui: 6/10èmes du corps étudiant, 4/10èmes des artistes effectivement actif ; 2/10èmes des artistes aidés par des fonds publics ; 2/10èmes des artistes programmé(e)s; 2/10èmes des dirigeants; 1/10èmes des artistes récompensés; et, à postes égaux et compétences égales, une artiste gagne en moyenne 18 % de moins qu’un homme. »

 A l’occasion de cette publication qui tombe à pic pour le 8 mars, les E.A.T. (Ecrivains associés du théâtre) ont organisé le 5 mars une table ronde à la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques, sur la question de la place des femmes au cinéma et au théâtre. Dominique Paquet, auteure et ancienne directrice de théâtre, commente ces chiffres et rappelle que l’un des premiers auteurs de théâtre, au Moyen-Âge en Europe, fut une Allemande: Hrosvita de Ganderscheim (930 et 935, et encore vivante en 973). Aujourd’hui oubliée, elle écrivit des pièces à partir de celles de Plaute et de Térence.

Sophie DESCHAMPS

Sophie DESCHAMPS

Même sort, rappelle la scénariste Sophie Deschamps, pour Alice Guy (1873-1968) qui, absente des manuels, réalisa pourtant des centaines de films, dont historiquement le premier de l’histoire du cinéma! La Fée aux choux (1896) qui donc précéda le célèbre L’Arroseur arrosé (1897) des frères Lumière. Et aussi des westerns, aux Etats-Unis, où elle termina sa carrière et mourut. Depuis toute petite, Sophie Deschamps, elle, rêvait de faire du théâtre: «J’ai abandonné le métier d’actrice, car on ne peut pas vieillir dans ce métier après trente-cinq ans. Ce qui m’a blessée, dans ma carrière, c’est de devoir séduire, l’obligation d’être la plus belle pour aller danser». Elle s’est donc tournée vers l’écriture dramatique puis le scénario: «C’est très jouissif d’écrire, car on tient les manettes». Il y a beaucoup de scénaristes-femmes, dit-elle, car « c’est un métier de l’ombre ». En revanche, les réalisatrices ne sont que 17 % à la télévision, et 25% au cinéma, et leurs films ne reçoivent pratiquement jamais de récompenses. «Les budgets de production pour les femmes sont très inférieurs, parce que les commissions d’attribution ne sont pas paritaires: le système  actuel exclut doucement les femmes. Pourquoi 85% des budgets de la Culture vont-ils aux hommes ? ».

 Du côté de la réalisation, «c’est plus lent, dit Cécile Tournesol, metteuse en scène de la compagnie L’Art Mobile, et plus difficile pour les femmes de monter des projets.» On leur fait moins confiance et la discrimination perdure: l’homme est l’artiste, la femme, sa muse. Et elles n’accèdent toujours pas à la direction des Centres Dramatiques Nationaux. «Quand Aurélie Filipetti a essayé de nommer plus de femmes dans les Centres Dramatiques Nationaux, elle s’est pris une volée de bois vert, précise Dominique Paquet. La ministre actuelle a décidé de faire des quotas et, a été alors votée à l’unanimité, une progression obligatoire de 5% par an, jusqu’à la sortie du seuil d’invisibilité (33%).

  »Pour les comédiennes, il n’existe pas d’étude “genrée“, mais on peut se demander où sont les actrices de cinquante ans? Seules 8% d’entre elles travaillaient en 2015, et en 2016, c’est encore pire», dit  Tessa Volkine, actrice et membre de L’A.A.F.A. (Actrices et Acteurs de France associés). «Avec ma voix grave, on m’a dit que je ne travaillerai pas avant quarante ans. On nous met dans des cadres. On fait peur par notre caractère engagé, par notre côté garçon manqué. Quand nous donnera-t-on la parole, à nous, les actrices?»

Il faudrait faire appel à l’imaginaire des autrices et auteurs, pour qu’ils écrivent des rôles pour elles. Pour que cessent les représentations stéréotypées des femmes dans les fictions. H/F* publiera sur son site à la fin mars, des consignes destinées aux formateurs, les incitant à déconstruire les stéréotypes sexués, mais aussi à rétablir les femmes au sein du patrimoine culturel.

 H/F : rencontre avec Sylvie Mongin-Algan

Sylvie Mongin-Algan © Carmen Mariscal

Sylvie Mongin-Algan © Carmen Mariscal

 Pendant longtemps, dans un milieu des Arts et de la Culture pourtant considéré, par nature comme émancipateur et égalitaire, animé par des valeurs humanistes et universelles, les inégalités entre hommes et femmes n’ont pas été un sujet de controverses. Devenues visibles, ces inégalités ont alors suscité de nombreuses réactions, dont la création de H/F, à l’initiative de quelques femmes de théâtre dont Sylvie Mongin-Algan qui dirige à Lyon le Théâtre Nouvelle Génération, un collectif d’artistes. «A l’issue d’une discussion avec Reine Prat, et d’une réunion à la Direction du théâtre du Ministère de la Culture, qui rassemblaient quelques directrices de lieux, pour nous inciter à postuler à des directions, j’ai proposé à des amis de réfléchir : comment se faire entendre par les professionnels du théâtre? D’où la création, en 2008, d’H/F comme les micros H.F. et non pas F/H.» Depuis l’idée a fait des petits, et H/F-Île-de-France a suivi,  et un réseau s’est constitué, à l’occasion du festival d’Avignon 2011, en Fédération inter-régionale du Mouvement HF qui compte aujourd’hui quatorze collectifs régionaux regroupant mille adhérent-es. Avec comme objectif: le repérage des inégalités des droits et pratiques entre hommes et femmes dans les milieux de l’art et de la culture, toutes fonctions confondues (artistiques, administratives et techniques) ; l’éveil des consciences par la sensibilisation des professionnels, des responsables institutionnels, des élus et de l’opinion publique, et l’orientation des politiques vers des mesures concrètes.

Un mouvement, qualifié d’évènement au regard de son caractère spontané et inattendu, par la philosophe Geneviève Fraisse. «C’est une aventure où on riait beaucoup, avec un plaisir à la subversion. Puis, il y a eu le travail sur le langue, le matrimoine, avec des chercheuses comme Aurore Evain. Le vocabulaire dérangeant, ça me plaît». Ainsi la Bolognaise Christine de Pizan, écrivaine féministe (1364-1431)-alors que la polémique sur la place des femmes dans la société faisait rage, se fit la défenseuse du «matrimoigne». À l’époque, quand il y avait mariage, les futurs conjoints déclaraient leur patrimoine (transmis par le père) et leur matrimoine (transmis par la mère). Pourtant, comme celui d »autrice »,  le mot fut effacé des dictionnaires…

 Auteure ou autrice ?

Aurore EvainFemme de théâtre et chercheuse, Aurore Evain a découvert par hasard, dans les registres du XVIIème siècle de la Comédie-Française, le terme « autrice » : «Je me suis engouffrée dans cette quête, jusqu’à épuiser les index et dictionnaires afin de débusquer sa trace sous les différentes orthographes de l’ancien français: auctrix, auctrice, authrice, autrice. Avec ce mot «autrice», remontait à la surface une longue généalogie littéraire de femmes qui l’avaient porté, de lointaines devancières en qui puiser notre autorité et notre légitimité de créatrices. 

Pendant des siècles, l’Académie française a travaillé à rendre «autrice» invisible : désormais, on cherche à le rendre inaudible, en ajoutant un discret appendice à auteur-e… Aujourd’hui, nous sommes de plus en plus nombreuses à brandir ce mot comme un étendard et à adopter la requête des dames déposée à l’Assemblée nationale en 1792 : «Le genre masculin ne sera plus regardé, même dans la grammaire, comme le genre le plus noble, attendu que tous les genres, tous les sexes et tous les êtres doivent être et sont également nobles».

 Le rapport du Haut Conseil conclut : «L’affaire Harvey Weinstein et la vague de dénonciations des violences sexistes et sexuelles ont jeté une lumière crue sur les difficultés spécifiques que rencontrent les femmes-artistes et sur les inégalités systémiques entre femmes et hommes dans le domaine de la culture. Si ce secteur ne fait certainement pas exception, il n’en demeure pas moins que les récents évènements (…) appellent à une action déterminée pour faire reculer les violences sexistes et les inégalités entre femmes et hommes. Dans cette prise de conscience qui doit se poursuivre et dans les actions qui doivent en découler, le Ministère de la culture a toute sa place à prendre.» Mais pour Sylvie Mongin-Algan, «les associations militantes doivent aller au-delà de la propositions des politiques. Rester inventives. Ça n’avance, que parce qu’on pousse. Dès qu’on relâche, les politiques mettent des cales.  Nous sommes des lanceuses d’alertes. »

 Mireille Davidovici

Le 5 mars, Table ronde à la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques, rue Ballu, Paris VIIIème.


Les Femmes et la culture, quelle place, quels outils pour sensibiliser et favoriser égalité et émancipation
?, le 8 mars, de 9 h à 16h 45,  Maison des Métallos, 94 rue Jean-Pierre Timbaud, Paris XI ème.

Le 11 mars, Parcours : Les Dames du tram, de 15h 30 à 17h, station (T3) Delphine Seyrig.
Du 11 au 13 mars, Paris des femmes, Théâtre des Mathurins, rue des Mathurins, Paris VIII ème.
Le 12 mars, table ronde : La Place des femmes dans le monde de la culture, de 19h à 22h, à la mairie du XIV ème, 2 place Ferdinand Brunot, Paris XIVème.
Le 26 mars, de midi à minuit, cinquante-trois autrices liront leurs pièces au Théâtre 14 Jean-Marie Serreau, 20 avenue Marc Sangnier, Paris XIVème

www.HF-idf.org ;  https://www.sacd.fr où-sont-les-femmes-dans-la-culture-toujours-pas-là

-Les Femmes ou les silences de l’Histoire de Michèle Perrot, Flammarion.

-Histoire d“autrice“ de l’époque latine à nos jours, d’Aurore Evain, revue SÊMÉION, Travaux de sémiologie n° 6, Femmes et langues, février 2008, Université Paris-Descartes et sur siefar.org

-Théâtre de femmes de l’ancien régime d’Aurore Evain, Garnier Classique.

-Qu’est-ce que la matrimoine ? d’Aurore Evain.
https://auroreevain.com/2017/11/23/quest-ce-que-le-matrimoine/

La Femme®n’existe pas de Barbara Métais-Chastanier, d’après La Colonie de Marivaux, mise en scène de Keti Irubetagoyena

©© Natalie Beder

© Natalie Beder

La Femme n’existe pas de Barbara Métais-Chastanier, d’après La Colonie de Marivaux, mise en scène de Keti Irubetagoyena

La pièce en un acte de Marivaux, peu jouée, paraît écrite à la louche moins fine en apparence que L’Île des Esclaves (très jouée). Ne pas s’y fier: bien carrée, elle pose aussi clairement les problèmes. D’abord, celui de hommes. Du moins les “masculinistes“ à qui la simple revendication d’égalité paraît être une insoutenable domination féminine. Les autres en restent à la rigolade. Ensuite,  le problème des classes: auquel toute organisation féministe se heurte à un moment ou un autre. Et  Arthénice peut alors se lancer avec madame Sorbin dans le combat: «Unissons-nous et n’ayons qu’un même esprit toutes les deux.» Mais Arthénice reste la représentante de la noblesse, et sa commère, de la bourgeoisie commerçante. Se pose aussi la question de l’organisation: tout pouvoir est-il abus de pouvoir? Et, plus simplement, de quelle façon se parler en assemblée générale, quelles concessions faire, ou ne pas faire, au départ?

Marivaux ne se prive pas, lui, de miser sur les défauts dits « féminins » (coquetterie et autres) et l’on voit bien ici que la question est celle de toute Constituante. Et enfin, brièvement, celle de la colonisation. «Depuis qu’il a fallu nous sauver avec eux (les hommes) dans cette île où nous sommes fixées, le gouvernement de notre patrie a cessé.»  -«Oui, il en faut un tout neuf et l’heure est venue», répond Madame Sorbin. L’heure «de sortir de l’humilité ridicule qu’on nous a imposée depuis le commencement du monde».

Mais à quel prix ? Aucune île n’est déserte et il y aura des “sauvages“ à combattre et à éliminer…Le spectacle commence par un récit: comment l’armée américaine a déporté les habitants du petit archipel des îles Bikini pour y tester, quelques mois après Hiroshima, une nouvelle bombe atomique et comment l’astucieux Français Louis Réard, fabricant de maillots de bains, s’est emparé du nom bikini, pour sa publicité: «la bombe anatomique».

Barbara Métais-Chastanier et Keti Irubetagoyena ont pris en main La Colonie comme un outil solide et performant. Deux grandes banderoles: La femme longue durée (épouse) et La femme à usage unique (prostituée) seront saccagées un peu plus loin par des silhouettes paramilitaires habitées par des actrices. Interpellation du public, assemblée constituante, bricolages divers et variés: elles font feu de tout bois…  Et ce bois parfois prend très vite, quand  elles règlent, avec un lourd et vieux téléphone de campagne ou de guerre, le dialogue entre madame Sorbin et son mari, ou celui entre Arthénice et son prétendant. Mais parfois le feu ne prend pas: l’espace scénique trop vaste disperse le dialogue et les temps de suspension ne redynamisent pas la réflexion… quoi qu’en pensent sans doute l’autrice et la metteuse en scène.

Mais restent des moments délicieusement intelligents  imaginés par ces chercheuses pointues, drôles et sensibles. Les personnages masculins sont presque absents du plateau mais les hommes y sont présents quand elles leurs confient des rôles de femme, avec la tendresse et le respect qu’ils devraient avoir envers  elles. Comédiens et comédiennes à égalité d’énergie et de drôlerie, avec hauts et bas.  Ici, l’on voit que le féminin peut l’emporter sur le masculin, et sans douleur. On a oublié quelque chose: l’amour. Eh ! Oui, celui de la petite Lina Sorbin pour Persinet, à la fois caillou dans la chaussure pour cette longue marche des filles, et baume qui guérira l’ampoule. Et madame Sorbin a encore quelque chose à dire à son vieux mari… La question reste ouverte: si, à la fin, les femmes rentrent dans le rang, cela ne clôt rien: «Et, quand même nous n’y réussirions pas, nos petites-filles réussiront »…

Christine Friedel

Théâtre de l’Échangeur, 59 avenue du Général de Gaulle, Bagnolet (Seine-Saint-Denis).  T. :01 43 62 71 20, jusqu’au 10 mars.

 

 

Les Journées du matrimoine 2016

Les Journées du matrimoine 2016

 

Rue_PernelleUne manifestation festive, en forme de manifeste. Objectif : mettre en lumière les créatrices du passé et leurs œuvres, parallèlement aux Journées du patrimoine (voir Théâtre du Blog ).
L’égalité entre homme et femme sur le front intellectuel et artistique passe par la revalorisation de cet héritage trop absent des livres d’histoire. L’inégalité reste flagrante : même si depuis dix ans, à l’issue du rapport de Reine Prat, la tendance s’inverse lentement : 26% des femmes signent les mise en scène du réseau conventionnée contre 22% en 2006 ; 21% dirigent des Centres dramatiques nationaux, contre 16% en 2006. À quand la parité ? Quand les femmes constituent 60% des étudiant(e)s des enseignements artistiques supérieurs.

 Pour cette deuxième édition, les différentes branches de la fédération nationale H/F pour l’égalité dans les arts et la culture, mobilisent de nombreux partenaires : en Bretagne ( Rennes), en Normandie (Rouen) et surtout en Auvergne-Rhône-Alpes, avec pas moins de seize événements (expositions, parcours urbains et conférences), du Rhône à la Haute-Loire, de Lyon à Bourg-en-Bresse, en passant par Montluçon et Annecy.

 H/F Île-de-France, pour sa part propose de nombreux événements aux côtés de nouveaux partenaires : Les Éditions de Femmes-Antoinette Fouque qui ont entamé cette réflexion depuis 1973 et ont sorti récemment l’imposant Dictionnaire Universel des Créatrices : 5000 pages couvrant quarante siècles de création dans le monde et dans tous les domaines. La jeune et florissante association AWARE ( Archives of Women Artists, Research and Exhibitions ) fondée en 2014 pour la diffusion des artistes femmes dans les musées et les universités. Des compagnies de théâtre, des lieux de spectacle, des musées et des bars et des cafés les rejoignent pour une programmation étoffée et festive.
À la Maison des Métallos, une exposition interactive sur L’Étoffe des femmes nous attend, avec nos morceaux de tissus, tandis que sept musées ouvrent leur fond au féminin : Jeu de Paume, Musée d’Art Moderne de Paris, Musée Carnavalet, Centre Pompidou, Musée d’Orsay, Petit Palais, Mac/Val (le seul à respecter un parité dans ses acquisitions). Au gré de parcours urbains dans Paris, agrémentés de musiques et de lectures, on découvrira des femmes savantes brûlées comme sorcières, depuis Hypathie la mathématicienne d’Alexandrie au lVe siècle, jusqu’à Pernelle Flamel, l’alchimiste du XVlème siècle… Des interventions artistiques dans le tram T3, une promenade-lecture du restaurant de la Coupole au Cimetière Montparnasse, sur les lieux de prédilections de Simone de Beauvoir et de sa sœur Hélène peintre méconnue … Autant de rendez vous pour évoquer Communardes et compagnonnes, peintres et autrices, poétesses et «scandaleuses », militantes du mouvement de la paix et résistantes, toutes combattantes, inventrices ou créatrices qui ont fait l’histoire en y laissant si peu de traces.

 

Mireille Davidovici

 

17 et 18 septembre : programme complet sur les sites :

www.matrimoine.fr

http://hfauvergnerhonealpes.wixsite.com/matrimoine

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Verso Medea

Verso Medea, spectacle-concert d’après Euripide, texte et mise en scène d’Emma Dante

 

 DSC2183«Mon théâtre concerne la barbarie du monde », commente Emma Dante, comédienne, auteure et metteuse en scène de Palerme. Dans ce spectacle musical créé en 2003 au Teatro Mercadante de Naples, des comédiens sorte de chœur antique populaire qui diffuse le rude esprit des terres marines, jouent les femmes de Corinthe.
La maudite, la magicienne Médée (Elena Borgogni), le ventre gros d’un enfant, est portée par une rage maléfique. Image qui rappelle Le Sorelle Macaluso d’Emma Dante, au festival d’Avignon 2014. Dans un élan généreux, et avec une même volonté de résistance et  de colère au machisme paternel et fraternel, une brochette de sœurs, un rien chiffonnières, répondent, comme en écho esthétique et moral, à cette galerie d’hommes jouant les vieilles femmes.
On est en pleine Sicile traditionnelle du vingtième siècle, attachée à ses traditions et où règnent matriarcat, Eglise et… misère. Chez Emma Dante, on condamne le pouvoir abusif des hommes sur les femmes, mais on s’amuse aussi, et on fait preuve d’une santé vigoureuse. Les femmes portent une robe noire dont elles relèvent le bas, et exercent l’art de médire des autres et d’injurier tous les hommes de la Terre, dont Jason.
La guerre des sexes bat son plein dans l’humeur vive d’être au monde. Médée pratique une magie néfaste et des actes barbares, et commet un infanticide. Princesse étrangère et exilée, figure errante attirée par l’ailleurs,  elle apparaît sous l’aspect d’une femme, humiliée mais pas vaincue, et lance ses récriminations contre Jason et contre Créon qui l’a injustement exilé de Corinthe. Elle semble possédée par un démon intérieur plutôt que par un enfant à naître.
Passion tragique, déchirements de cette femme répudiée par son amant; Elena Borgogni a chorégraphié avec hargne une danse personnelle, dans un instinct de survie: du coup, la brochette d’hommes aux habits de femme, s’en trouve comme apaisée, à l’écoute d’une sœur féminine outragée par un mâle.
Ce chœur masculin entoure Médée avec cocasserie et gravité; il assume son travestissement, pointant juste la condition de la femme.  Avec une  remarquable invention théâtrale, l’accouchement est mimé, et le nouveau-né, juste figuré par une couverture, pleure, bercé dans des bras attentifs.
Les frères Mancuso, collecteurs de chansons locales mais aussi compositeurs, jouent de leurs beaux instruments traditionnels et chantent à merveille des airs entêtants, profondément ancrés dans l’histoire de leur peuple… Comme sortis de la nuit des temps, des rites quotidiens, paysans et marins, orgueil de la terre sicilienne.
Un rêve obscur à la magie éblouissante dans l’obscurité du plateau.

Véronique Hotte

Théâtre des Bouffes du Nord, Paris XVIIIème, jusqu’au 28 mai. T : 01 46 07 34 50.

 

Princesse vieille reine de Pascal Quignard

Princesse vieille Reine de Pascal Quignard, mise en scène et interprétation de Marie Vialle

 mv-022Après Le Nom sur le bout de la langue, conte de Pascal Quignard qu’elle a mis en scène et interprété, en s’accompagnant au violoncelle, comme Triomphe du temps, Marie Vialle poursuit sa route avec l’écrivain qui lui a écrit un texte sur mesure.
 « Dans Princesse vieille Reine, explique-t-il, les contes seront beaucoup plus nombreux. Ce n’est plus un mouvement de sonate. C’est plutôt une longue suite baroque. Une longue suite de mouvements de danses, de robes, plus variés, plus affluents, plus contrastés. Princesse, puis vieille reine, tel est le destin des femmes. Une unique figure de femme se transforme dans de grandes robes de plus en plus belles. Une seule histoire faite de pleins d’histoires. »
En tutu de tulle vaporeux, l’actrice s’approprie l’espace en décrivant d’amples mouvements, avant d’endosser, en longue tunique, le personnage d’Emmen, fille de Charlemagne, dont elle narre les  amours clandestines. La neige est tombée pendant que les amants s’étreignent dans «la loge noire d’un bûcher ».

  Comment regagner la maison des femmes sans laisser de traces? « C’est ainsi qu’Emmen prit Eginhard à califourchon sur son dos. Sur ses hanches, la princesse Emmen retint avec ses mains les cuisses puissantes d’Eginhard. Elle avance dans la neige. (…) Titubante, sans qu’il la fasse vaciller, ni qu’il tombe, elle traverse l’étendue qui mène au palais de son père.(…) C’est depuis ce temps que les femmes ont pris l’habitude de porter les hommes sur leurs épaules. »
Après ce premier conte, changeant de rôle et de robe, Marie Vialle sera tour à tour la jeune captive, concubine de l’empereur de Chine, la maîtresse séduite et abandonnée d’un prince japonais, noyée dans la mélancolie de l’attente, une chatte voluptueuse, puis dans «un autrefois, avant tous les autrefois » une vieille reine au bout du rouleau, aux confins du monde occidental : « Je me sens lasse, je sens décembre dans mes os », se plaint-elle.
Décembre, les neiges d’antan : le blanc est la tonalité dominante de ces textes d’une grande délicatesse parfois teintés de quelques touches féministes. Malgré le style imagé de l’auteur, perlé de détails sensuels et d’une douce nostalgie, il y a dans Princesse Vieille Reine, une certaine mièvrerie soulignée par la mise en scène.

  Certes, Marie Vialle est belle et joue avec grâce, mais elle nous transporte d’une princesse à l’autre, de la jeunesse à la mort, dans un compte à rebours sans suspens. Le déploiement systématique de costumes, qu’on peut trouver agaçant, tient lieu de seule dramaturgie,  avec une juxtaposition de personnages  sans autre nécessité que la performance d’une actrice.
Un spectacle léger, aussi peu consistant que ces flocons de neige si souvent évoqués. Certains tomberont sous le charme. Peut-être….

 Mireille Davidovici

Théâtre du Rond-Point, Paris, jusqu’au 27 septembre, T: 01 44 95 98 21 www.theatredurondpoint.fr

Les 28 et 29 novembre à l’Equinoxe de Châteauroux ; les 19 et 20 janvier aux Espaces Pluriels, à Pau ; le 29 janvier, au Théâtre des Quatre saisons de Gradignan ; le 5 février, au Granit de Belfort et du 11 au 17 au Théâtre Garonne à Toulouse.
On pourra aussi retrouver Marie Vialle dans Ivanov de Tchekhov à L’Odéon-Théâtre de l’Europe, (reprise du 20 octobre au 1er novembre).

 Princesse Vieille Reine est publié aux Editions Galilée.

L’Instant Molière ou Les Femmes à l’école de la vie

Festival du pont du bonhomme:

L’Instant Molière ou Les Femmes à l’école de la vie, adaptation de Bernard Lotti, Laurent Lotti et Jacques Casari,  mise en scène Bernard Lotti

  Molière©Jean-Marie OriotComme toutes les éditions de ce festival, organisé par la compagnie de l’Embarcadère, dirigée par Christophe Maréchal, c’est dans l’amphithéâtre de plein air situé en face du magnifique et mélancolique cimetière à bateaux de Kerhervy-une marine somptueuse de carcasses de navires, gravée une fois pour toutes dans l’imaginaire-que se donne  ce spectacle, à moins qu’une pluie passagère n’exige, au dernier moment, un repli stratégique sous chapiteau.   
  L’enchantement des paysages alentour n’en reste pas moins un révélateur efficace de théâtre populaire, avec  cette dernière création de Bernard Lotti, un familier du festival qui  traque la quête du pouvoir chez Molière : le roi sur ses sujets, le maître sur ses valets, le père sur ses filles, la bourgeoise sur ses servantes, la parvenue sur ses paires plus jeunes.
   Ces «femmes à l’école de la vie», dévalorisées ou mésestimées, passent de tutelle en tutelle. Résonnent ici des scènes significatives des Femmes savantes, des Précieuses ridicules, de l’École des Femmes,  et de Dom Juan.
Des commentaires d’auteurs du XVIIème siècle,  comme Fénelon sur l’éducation des filles, alimentent le propos. Pour le metteur en scène, les hommes représentent un monde figé et ancien face au désir de vie, d’émancipation et de liberté chez les femmes.
Loin de vouloir imposer sur scène une tribune politique dont les slogans bien connus et ressassés auraient un goût de réchauffé, les femmes s’adressent au public, façon école républicaine de Jules Ferry, en maîtresses d’école au long tablier sombre, dressées debout devant leur grand tableau noir d’antan, une craie à la main.
Evocation désuète, quand l’heure est au numérique, mais qui inscrit les hommes dans un repli passéiste, tels d’éternels petits garçons, jamais grandis, obéissant à leur maîtresse d’école qu’ils voudraient et/ou aimeraient  voir enfin soumise…
On croit entendre le bon bourgeois Chrysale des Femmes savantes : «Il n’est pas bien honnête et pour beaucoup de causes, Qu’une femme étudie et sache tant de choses : Former aux bonnes mœurs l’esprit de ses enfants, Et régler la dépense avec économie, Doit être son étude et sa philosophie. »

 Le spectateur sourit aussi devant le ridicule de Philaminte, Armande et Élise, ces savantes qui s’esclaffent et se pâment devant le fameux : «Quoiqu’on die » du sonnet du bel esprit et vaniteux Trissotin.
   Mais les données humaines ne sont pas si tranchées et flirtent avec l’ambiguïté ; le spectacle donne à réfléchir sur tous et toutes, grands et petits d’un même monde. Ainsi, Arnolphe dans L’École des femmes, se plaint de la trahison de l’innocente Agnès,  précieuse qui s’ignore et qui, à son tour, reproche avec esprit, à son barbon de père adoptif, de ne pas avoir su se faire aimer instinctivement comme le jeune Horace. Célimène, elle, rétorque  à son misanthrope d’Alceste : «Des amants que je fais, me rendez-vous coupable ? Puis-je empêcher les gens de me trouver aimable ? »
Sautant d’une pièce à l’autre, on retrouve le mythique Dom Juan répondant à Sganarelle : «Non, non : la constance n’est bonne que pour des ridicules ; toutes les belles ont droit de nous charmer, et l’avantage d’être rencontrée la première ne doit point dérober aux autres les justes prétentions qu’elles ont toutes sur nos cœurs. »
Chacun, mis à égalité scénique, est remis à sa place, sans y paraître, das ce théâtre de tréteaux avec penderie colorée en toile de fond, où circulent, de cour à jardin, les acteurs et les techniciens: Yassine Harrada, Jean-François Lapalus, Bernard Lotti, Tristan Rosmorduc, Moanda Daddy Kamono, et les femmes qui ne rencontrent guère l’autre sexe  ou si peu :Marieke Breyne, Marilyn Leray, Elizabeth Paugam, Emmanuelle Ramu et Margot Segredo. Ce sont elles qui ont la niaque et enchantent le plateau, grâce à l’évidence de leur argumentation vive, leur capacité à rire et  à se moquer des hommes balourds et suffisants, à leur malice et leurs facéties, tant dans le verbe et l’art des réparties, que dans une belle souplesse, une danse et une gestuelle éloquentes.

  Et l’on sourit encore à entendre laquais et servantes se faire réprimander crûment par leurs maîtres, nouveaux riches oublieux de leurs origines : « Bouvière, fripon, impudent, scélérat, mécréant… » Un théâtre de marionnettes, une mise en abyme miniaturisée et judicieuse, reprend ces figures farcesques à l’infini. Bref, un moment réjouissant, avec défilé d’insultes et jurons pleins de verdeur.

  À noter aussi  Libicoco, un solo de clownesse désenchantée et décalée d’Ingrid Coetzer, et Silento, un joli trio poétique de trapèze et musique, ode à la lenteur, avec les danseurs Marco Le Bars et Eve Le Bars-Caillet, aussi violoncelliste, et Etienne Grass à l’accordéon. Un spectacle de rue délicat sur l’art amoureux.

 Véronique Hotte

 Festival du Pont du Bonhomme  à Lanester (56), du 18 au 24 juillet.

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